Accompagnement artistique et culturel à la réhabilitation thermique d’un patrimoine classé

Lens | Cité minière - réhabilitation

Accompagnement artistique et culturel à la réhabilitation thermique d’un patrimoine classé Permettre aux habitants de participer à des démarches culturelles et artistiques en lien avec des artistes en résidences sur le territoire

La Maison des Artistes et des Citoyens lors de la Constellation Imaginaire 2016 - Crédit Antoine Repessé

Au cœur d'une cité remarquable se loge une « maison poreuse » comme l’a baptisée Laurent Coutouly, directeur de Culture Commune, Scène nationale du Bassin minier. Une maison des mines réhabilitée, où les habitants viennent échanger et créer avec les artistes en résidence. L’endroit incarne une démarche de réhabilitation de l’habitat inédite dans laquelle un bailleur social et un équipement culturel se rejoignent, pour retrouver le lien avec les habitants et renforcer le vivre ensemble.

Aux grands maux, l’originalité des moyens

L’histoire commence il y a six ans. En 2011, le bailleur social SIA Habitat entreprend un nouveau programme de réhabilitation de l’habitat minier composant une partie de son patrimoine sur deux sites : la Cité de la Solitude à Vieux Condé et la Cité des Provinces à Lens.

Si dans la première cité, une vingtaine de logements se libèrent et permettent une rotation nécessaire à la réhabilitation de l’ensemble des habitations, dans la Cité des Provinces (650 logements au total) l’opération prend une ampleur plus importante. La vacance dans le patrimoine du bailleur atteint alors jusqu’à 150 logements vides. « Les personnes n’étaient pas forcément hostiles à la réhabilitation mais ils voulaient autre chose, un parcours résidentiel varié » explique Philippe Castelain, directeur territorial de SIA Habitat. Cette vacance a des répercussions multiples : difficultés dans les commerces locaux et dans les établissements scolaires, rupture du tissu social, éloignement entre les habitants et leur bailleur, etc. Le directeur de Culture Commune, qu'il rencontre lors d’une réunion stratégique, partage cette analyse. « Notre relation de proximité avec les habitants s’était distendue » reconnaît Laurent Coutouly.  « Cette opération de réhabilitation nous fournissait l’occasion de réinvestir le quartier. »

Mais comment des acteurs culturels peuvent-ils intervenir et participer à une opération de réhabilitation ? Comme il n’existe aucun modèle, il « suffit » d’inventer. Les deux partenaires déposent un dossier qui leur permet d’obtenir auprès du FIS (Fonds d’Innovation Social) 50 000 euros, consolidant les moyens par ailleurs dégagés par l'un et l'autre pour s’investir dans cette démarche inédite.

L’art comme ciment

En 2015 l’opération démarre, articulée en trois phases. La première dure trois mois : porte à porte, balade artistique dans toute la cité et reprise d’une veillée avec la compagnie HDZ de Guy Alloucherie. Tout est co-construit avec les habitants.  « Nous avons voulu refaire un portrait du quartier » dit Laurent Coutouly. À l’occasion de la veillée, artistes et habitants confrontent leur ressenti. À l’issue de cette phase, il ressortait clairement une impression de « c’était mieux avant », concède Philippe Castelain, « les habitants trouvaient que les rapports humains, la solidarité, le collectif avaient disparu ».

À l’occasion du deuxième volet, Culture Commune et SIA Habitat organisent l’installation d’une famille dans une maison non réhabilitée. Mais pas n’importe laquelle : une famille de marionnettes géantes, des Paddocks. Pendant quinze jours, elle multiplie les excursions dans la cité. La maison des Paddocks est ensuite réhabilitée sous un angle artistique. Toutes les pièces sont décorées : la cuisine devient une forêt vierge, la cave se pare d’un environnement sonore. « Quand nous avons ouvert la Maison des artistes et des citoyens, les habitants ont vite identifié le lieu, » explique Laurent Coutouly. « En s’y rendant ils pouvaient rencontrer les artistes, échanger, créer tout en appréciant la réhabilitation ». Des permanences du bailleur mais aussi d’artistes y sont établies. Avec les concours financiers de la DRAC (direction régionale de l’action culturelle) de nouveaux événements y sont organisés, toujours en collaboration avec les résidents. Ainsi naît l’opération ORNI (objet roulant non identifié), troisième phase du projet, au cours de laquelle chaque famille construit son objet et participe à la parade finale de ces drôles de machines.

Mariage heureux et inspirant

Le résultat de ce partenariat est le succès de la réhabilitation. « Dans la Cité des Provinces, nous avons vu des personnes hostiles à la réhabilitation devenir progressivement les ambassadeurs de cette opération », indique Philippe Castelain. 25 logements sont réhabilités en 2015, 100 l’année suivante, 185 sont concernés d’ici octobre 2018 pour une fin de l’opération prévue en 2019.

D’ores et déjà cette démarche originale fait référence. « On ne peut pas dupliquer une telle expérience », estime Laurent Coutouly « mais on peut s’en inspirer », reprend Philippe Castelain ajoutant : « dans la Cité des Provinces, nous avons réalisé une véritable opération d’aménagement du territoire ». Fort de cet acquis, SIA Habitat réfléchit à la manière dont la culture va intervenir dans une opération de réhabilitation similaire qui concerne 116 logements à Méricourt.

ATOUTS

Cette cité minière pavillonnaire située au pied de la Base 11/19 de Loos en Gohelle, avec ses façades remarquables, ses jardins privés et ses immenses espaces publics, est un emblème du Bien inscrit par l’UNESCO. Pourtant, les logements sont des « passoires thermiques », coûteux en énergie pour les ménages et par ailleurs, le lien social s'y dégrade progressivement. Sa réhabilitation constitue un enjeu majeur et urgent. Le partenariat du bailleur SIA avec Culture Commune est une action innovante et remarquable qui doit inspirer les immenses chantiers à engager dans les autres cités minières, notamment dans le cadre de l'engagement de l'État, des collectivités locales et des bailleurs sociaux pour le Renouveau du Bassin minier.

Repères :

Maîtrise d’ouvrage

SIA Habitat, Culture Commune.

Chiffres-clés - la Cité des Provinces c’est :

  • 543 logements miniers sur 640 logements,
  • Plus de 1 600 habitants,
  • 49 ha (sur la commune de Lens).

Calendrier :

2011

débuts des réhabilitations,

2015

ouverture de la Maison des artistes et des citoyens,

2019

fin programmée du chantier de réhabilitation